Maître de conférences en anthropologie à Northwestern University, Etats-Unis - Lauréate EURIAS
Septembre 2012 à juin 2013
Anthropologue linguistique et culturelle, maître de conférences à Northwestern University à Evanston, IL, aux États-Unis, Katherine E. Hoffman se spécialise dans le rapport entre la culture expressive, l’ethnie, le droit et l’économie politique dans l’histoire et dans la période contemporaine. Sa recherche de terrain se situe au Maroc, où elle étudie les processus de la colonisation française, l’anti-impérialisme, le nationalisme, et le post-nationalisme. Actuellement Katherine Hoffman rédige un livre sur la politique indigène française au Maroc et les tribunaux coutumiers dans les montagnes de l’Anti-Atlas, Mirror of the Soul: Language, Islam, and Law in French Native Policy of Morocco (1912-1956). Elle a également une fonction d’expert sur le Maroc pour la société National Geographic.
"Le Miroir de lâme : Droit coutumier et Islam dans la transformation du système judiciaire au Maroc depuis 1930"
Miroir de l'âme est une enquête interdisciplinaire des transformations juridiques dans le Maroc rural sous le protectorat français (1912-1956) tenant compte des enjeux coloniaux et des luttes internes à la communauté berbère. Elle porte sur les relations entre la pratique juridique, la religion, le genre et l'identité collective. La méthodologie du projet et les méthodes d’analyse sont issues de l'ethnographie, de l'anthropologie linguistique, de l'histoire et des études juridiques. Quant aux données, elles sont issues des archives orales et écrites. Les documents d'archives utilisés consistent en documents classifiés (principalement dans les archives militaires à Vincennes et dans les archives diplomatiques de Nantes) et non classifiés (stockés dans un ancien bureau montagnard d'affaires indigènes au Maroc établi par le Protectorat en 1928 et qui n’ont jamais été exploités dans le cadre de recherches universitaires ou à d'autres fins). Le projet réuni ces diverses sources textuelles avec des histoires orales recueillies dans le sud du Maroc, mettant l'accent sur la mémoire collective et les biographies des personnes ayant travaillé dans l'administration française, dans la préparation des actes juridiques, ou dans l'administration des terres rurales juste après l'indépendance et la dissolution des tribunaux coutumiers à des fins politiques, mais sans qu’aucun autre système ne les aient encore remplacés.
L’étude des comptes-rendus des tribunaux coutumiers, des processus juridiques et administratifs, et la façon dont ces interprétations officielles diffèrent de la correspondance officielle sont particulièrement importantes. Les litiges dans les tribunaux coutumiers peuvent sembler triviaux - concernant l'usage d'une parcelle de terre, ou d'un héritage, ou le désaccord sur les termes du divorce.
Mais collectivement, ils ont constitué des éléments à travers lesquels le droit et les identités collectives ont commencé à évoluer chez les Berbères ruraux sous la domination française à la faveur d'une consolidation de la nation marocaine fondée sur une identité arabe. Cette période soulève des questions également sur le rôle de la coutume dans les sociétés musulmanes à différentes époques. Grâce à cette micro-étude et aux orientations législatives qui l’encadrent au niveau du Protectorat, l’on est en mesure d’obtenir des informations sur l'institution judiciaire berbère qui jusqu’à présent n’a été étudiée que pour ses normes et ses principes. Longtemps considérés comme importants par les nationalistes pour des raisons polémiques, les tribunaux coutumiers n’ont jamais été examinés de l'intérieur, à travers leurs pratiques, et en fonction des objectifs des utilisateurs berbères de milieu rural, pauvres pour une grande partie. Le projet examine aussi comment la politique indigène, visant à renforcer l'influence du protectorat, au contraire a aidé à mener à sa disparition, alors même qu'elle offrait de nouvelles possibilités, en particulier pour les femmes en milieu rural, afin d’obtenir des droits qui leur avaient longtemps été refusés.
HOFFMAN, Katherine E. Le serment, les marabouts et la mosquée dans le droit coutumier berbère au Maroc. In colloque pluri-disciplinaire Paris-Ouest Nanterre (1, 2010, Nanterre), Puissances de la Nature, Justices de l’Invisible: du maléfice à l’ordalie, de la magie à la sanction, Nanterre : Centre d’Histoire et Anthropologie du Droit, 2012.
HOFFMAN, Katherine E. Berber Law by French Means: Islam and Language in the Moroccan Hinterlands, 1930-1954. Comparative Studies in Society and History, 2010, vol. 52, no 4, p. 851-880.
HOFFMAN, Katherine E. Internal Fractures in the Berber-Arab Distinction: from Colonial Practice to Post-National Preoccupations. In HOFFMAN, Katherine, GILSON MILLER, Susan (éds.). Berbers and Others: Beyond Tribe and Nation in the Maghrib. Bloomington: Indiana University Press, 2010. p. 39-61.
HOFFMAN, Katherine E. We Share Walls: Language, Land and Gender in Berber Morocco. Blackwell Studies in Discourse and Culture. Oxford: Blackwell-Wiley Publishers, 2008.
HOFFMAN, Katherine E. Purity and Contamination: Language Ideologies in French Colonial Native Policy in Morocco. Comparative Studies in Society and History, 2008, vol. 50, no 3, p. 724-752.