#15 ans de l'Institut - Ali Hossaini - L'Institut d'études avancées de Nantes. Vision 2040

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L'Institut d'études avancées de Nantes : Vision 2040

Ali Hossaini

En 2038, l'Institut d'études avancées se trouve au cœur de Nantes. 

Loire

Le mur de verre de la bibliothèque encadre son ancien site, une zone humide qui protège la ville de la Loire. En effleurant le mur, on active une présentation en réalité augmentée grandeur nature de la façon dont Nantes s'est adaptée à la montée des marées. La devise de l'Institut - Né dans l'espoir, forgé dans la crise - incarne son évolution en tant que centre de recherche et d'innovation de premier plan.

Les années 2020 se sont achevées sur une note difficile. Des conditions météorologiques extrêmes et mortelles - pluies torrentielles suivies de sécheresse - sont devenues l'emblème d'un désordre mondial en matière d'écologie, d'économie et de politique. Les sociétés se sont polarisées, mais les tentatives visant à instaurer l'équité, que ce soit en matière de richesse, de santé ou de pouvoir, ont créé de nouveaux vides. La Grande Oscillation a commencé en 2029, lorsque la vie a basculé d'un extrême à l'autre et que l'humanité a fini par admettre que le monde était incontrôlable. Le soutien au monde universitaire a diminué et, lorsque l'Institut a été inondé en 2030, la ville de Nantes a transformé son site en marais.

La fragilité a permis l'agilité. En 2032, l'Institut n'avait pas grand-chose à perdre en remplaçant les disciplines par des domaines. La Grande Oscillation avait révélé les dangers de la spécialisation, mais les frontières académiques empêchaient une collaboration interdisciplinaire indispensable. L'Institut a éliminé ce problème en réorganisant les connaissances autour de la pratique. Les domaines sont des environnements d'application. Sans tenir compte des disciplines, les domaines apparaissent comme des champs dont la gestion nécessite une expertise coordonnée. L'éducation, l'alimentation, le transport, les soins de santé et le gouvernement en sont des exemples, et ils peuvent être divisés en une myriade de sous-domaines qui conservent la complexité de catégories plus larges.

Le concept de domaines et les méthodes connexes de réflexion sur la conception ont ouvert de nouvelles perspectives à l'Institut. Des ingénieurs du Technocentre Airbus, des artistes d'APO-33, Mire et Gran Lux, et des urbanistes de Nantes Métropole se joignent régulièrement aux cohortes de l'Institut. Les anciens Fellows ont une forte présence virtuelle. Lors de la réorganisation, la direction a étendu les modèles de direction scientifique et a utilisé des plateformes de participation démocratique pour créer des communautés florissantes d'anciens Fellows. Ce réseau de parties prenantes mondiales explique en grande partie la résilience de l'Institut.

Chaque année, l'Institut lance des défis de domaine aux futurs Fellows. Les candidats peuvent également proposer de nouveaux domaines. Contrairement aux craintes initiales, les domaines ont simplifié le travail des comités d'admission. Les concepts interdisciplinaires sont faibles par définition. En revanche, les domaines admettent des analyses complémentaires sans aucune limite quant aux modèles de causalité. La recherche se mêle à l'ingénierie, et les deux se mêlent à la conception. Une promotion peut bénéficier d'une analyse quantitative des réseaux sociaux à grande échelle, tempérée par la microhistoire des individus. Les universités considèrent l'Institut comme un banc d'essai pour de nouveaux programmes éducatifs, et le modèle nantais a été adopté dans le monde entier.

La valeur d'une résidence à l'Institut va bien au-delà de sa durée. Les défis de chaque domaine identifient les lignes de faille dans l'industrie, la culture et la gouvernance, et les promotions successives de l'Institut sont bien placées pour soutenir un changement positif. Les réductions de financement ont forcé les institutions de recherche et, par conséquent, les chercheurs, à devenir des entrepreneurs. À l'occasion de son 30e anniversaire, en réponse aux entreprises, aux fondations et aux gouvernements, l'Institut lancera un service de conseil commercial. Les boursiers viennent toujours à l'Institut pour une recherche autodirigée. À l'issue de leur formation, ils peuvent devenir des acteurs du changement qui développent des projets humains et écologiques.

Ali HOSSAINI